15.12.2025 – Chronique du lundi
15 décembre 2025 § Poster un commentaire
Silence, on milite !
Amies auditrices et lectrices, amis lecteurs et auditeurs, vous qui m’écoutez sur les ondes et les électrons de la Radio FMR [+] de Toulouse ou qui me lisez sur le blog de mon site web philippepitet.com, soyez les bienvenu·es dans cette Chronique du lundi 15 décembre 2025.
Une chronique très courte et rédigée à la va-vite ce matin car ma journée, comme la semaine va être plus que trépidante pour ma modeste petite personne submergée par un agenda bien trop ministériel. Mais quoi qu’il en soit aujourd’hui je me dois tout de même de vous entretenir de deux ou trois choses du monde qui passe sous mes yeux.
Elle sera courte car je dois vous avouer que je suis en pleine mobilisation syndicale. En effet, cette semaine, au sénat français, aura lieu l’examen de la proposition de loi [+] portant sur la continuité des revenus pour les artistes-auteur·ices. Ce projet de loi déposé par la sénatrice verte Monique de Marco sera examiné en séance publique ce jeudi 18 décembre prochain dans le cadre de la niche du groupe écologiste au sein de la Chambre Haute de la République Française, avant d’aller suivre son cours vers l’Assemblée Nationale, pour une adoption (ou non !) de cette loi qui permettrait à près de 400 000, personnes affiliées à travers leurs activités qui donnent lieu à des droits d’auteur ou à une rémunération liée à la vente ou à l’exploitation des œuvres de l’esprit. C’est à dire les artistes-auteur·ices qui créent les œuvres littéraires, graphiques, dramatiques, musicales, chorégraphiques, audiovisuelles, cinématographiques, plastiques et photographiques.
Je vais être concis sur le sujet afin que vous compreniez la situation. En tant qu’artistes-auteur·ices nos revenus ne viennent que de ce que l’on appelle les droits d’auteurs [+], je ne rentre pas dans le détail, vous n’aurez qu’à suivre les liens que je pose dans le texte de cette présente chronique sur mon site philippepitet.com, et pour les auditrices ou auditeurs qui m’écoutez vous pouvez vous y rendre aisément afin de connaître les références dont il est ici question. Bon bref, pour revenir au sujet principal qui nous occupe ici et donc d’un projet de loi qui se propose d’améliorer la situation de plusieurs centaines de milliers d’artistes-auteur·ices, dont je fais partie, j’en reviens à nos droits d’auteurs qui sont notre principale ressource. Les droits d’auteurs sont en quelque sorte les fruits de notre travail. En tant qu’artiste plasticien, lorsque je vends une idée, un concept, une œuvre, un dessin, un volume, une vidéo ou tout autre produit de mon esprit, c’est le droit d’utiliser cette œuvre que je cèdes contre pièces sonnantes et trébuchantes (ou non !). Et là je la cède soit directement à une personne qui va garder cette œuvre pour elle et faire sens dans sa collection ou son salon, mais qui peut aussi en faire un objet de spéculation, tout comme je peux la céder à un·e diffuseur·euse qui voudrait l’exploiter pour s’en faire un revenu à son tour, comme un·e éditeur·ice pour un bouquin, un·e producteur·ice audiovisuel·le pour de l’image en mouvement, un·e publicitaire pour une campagne de promotion de saucissons ou de torchons et j’en passe, c’est infini, puisque notre société de l’échange est faite d’images, de formes et de plasticité des sens. Donc ces droits me permettent de vivre au moment où je les vends, et si je les vends bien cet argent me permettra de vivre quelques jours, quelques semaines, voire exceptionnellement quelques mois.
Ainsi me direz-vous tout va bien dans le meilleur des mondes, il me suffirait que je vende régulièrement des toiles ou des dessins et ma vie serait un long fleuve tranquille entre mon salon et mon atelier, parsemé de voyages idylliques comme dans une telenovela brésilienne peuplée de gens riches et oisifs autant qu’oisives. Hélas, comme des dizaines et des centaines de milliers de mes collègues, je suis loin de vendre mes produits de l’esprit aussi souvent que cela serait nécessaire pour vivre dignement ne serait-ce qu’au simple niveau du seuil de pauvreté. Et pire encore, je suis loin de vendre mes œuvres des sommes colossales comme beaucoup peuvent le croire parce que, ouvrons les guillemets, les toiles de maitres valent une fortune, fermons ces stupides guillemets ! Et puis, sauf quand j’anime des ateliers, ou que je crée pour le compte d’autrui, comme par exemple faire des images pour un clip vidéo, une pochette d’un album de musique ou encore des éléments de scénographie pour une pièce de théâtre, je ne travaille pas sur commande. Le labeur de l’artiste-auteur·ice est d’inventer des choses, des mots, des images, des formes, des sons, des musiques, des univers. Elle ou il n’interprète pas il ou elle crée. Plus particulièrement pour les artistes plasticiennes et plasticien nous fournissons un travail qui interroge le monde. C’est pour cela que les artistes-auteur·ices ne sont pas des intermittent·es du spectacle comme les artistes-interprètes. Même si parfois comme dans les secteurs de la création musicale, les artistes-auteur·ices qui interprètent leurs œuvres sont aussi considéré·es comme des interprètes et bénéficie du régime spécifique de l’intermittence du spectacle. Tout cela pour remettre les choses au clair pour toutes celles et tous ceux qui ne le voient pas, le modèle économique de l’artiste-auteur·ice suit un schéma paupérisant. En gros, nous sommes plus que souvent obligé·es de travailler à des boulots alimentaires pour pouvoir travailler à nos propres labeurs faits de recherches et d’expérimentations plus que de diffusions. On aura compris que cette proposition de loi, qui est portée depuis des années, serait un véritable bol d’air pour plusieurs centaines de milliers d’entre-nous. Voilà pourquoi nous nous mobilisons fortement partout en France cette semaine, personnellement avec le STAA CNT-SO [+]. Et particulièrement dans la capitale occitane avec le collectif Travailleur·euses de l’Art 31 [+] au BBB Centre d’Art [+], rue Michel-Ange entre Bonnefoy et Borderouge, mercredi prochain pour un plateau radio – débat ouvert sur le sujet avec la Radio FMR [+] de Toulouse.
Voilà donc pourquoi, je vais vous laisser, je ne vous aurais pas parlé de grand chose d’autre que de ces légitimes revendications d’artistes, qui ne sont que des gouttes d’eau dans cet océan déchainé des turpitudes du monde. Je ne vous aurais pas parlé de la répression du monde paysan en France, du retour par les urnes du fascisme triomphant en Amérique du Sud, de la Gen Z qui fait tomber en Bulgarie un premier gouvernement européen et d’une soirée ACAB à Toulouse qui a mis dans une grosse colère l’édile principal de la Ville rose et en PLS la presse fascisante de France. J’y reviendrai dès la semaine prochaine avant de m’échapper en compagnie de ma très chère et tendre Thérèse [+] vers les cimes majestueuses de notre cher Pays Diois pour une villégiature bien méritée.
En attendant, lectrices et lecteurs du blog de mon site web philippepitet.com, je vous laisse avec deux images de mon cru, d’il y a longtemps et dont l’assemblage me parait bien illustrer le temps qui passes sous mes yeux. Pour les auditrices et les auditeurs vous entendez en fond un autre son d’une autre installation que j’avais présentée il y a quelques temps dans le cadre d’un workshop avec de chouettes élèves. Bref je vous laisse, je vous souhaite une belle semaine d’hiver, ponctuée des nuits les plus longues de l’année et vous dit : a diluns venent, addisiatz amigas e amics !

Audio diffusé la semaine du 15 décembre 2025 sur les ondes de Radio FMR -Toulouse :
La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…
PhP

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