11.12.2023 – Chronique du lundi
11 décembre 2023 § Poster un commentaire
De pire en pire
Bien chères et chers amis autant qu’amies quelque soit le genre dans lequel vous vous situez, je vous souhaite bienvenue dans ma Chronique du lundi 11 décembre 2023.
Nous voilà donc au début d’une nouvelle semaine bien trépidante qui s’annonce. Je dis « nous », mais en fait je parle pour moi. Car pour vous je ne sais pas, mais pour ma part en ce qui concerne ma temporalité du moment, ce moment où je démarre mes élucubrations éditoriales du premier jour de la semaine il doit être vers les six heures du matin. Toujours ce décalage entre l’émetteur et le récepteur ou la réceptrice dans ces billets du lundi. Et puis je ne sais pas de quoi seront faits vos jours à venir, mais la semaine va s’avérer extrêmement studieuse en ce qui me concerne.
J’avoue donc que le nous dit début était bien abusif.
À moins que je ne me prenne pour certains de ces dictateurs qui ont jalonnés l’histoire occidentale et qui s’annonçaient sans scrupule à la première personne du pluriel… Non, jee vous rassure, je n’en suis pas encore là !
Dans tout les cas je sais que ma semaine va être un peu poignée dans le coin ainsi que je pouvais le dire dans un passé motorisé sur deux roues du temps de ma folle jeunesse en cuir noir et en casque intégral.
Alors aujourd’hui je confesse ne plus savoir où donner de la tête pour rester dans la chronique du temps qui passe sous nos yeux. J’ai passé une semaine sans trop m’attarder sur le fameux grand cirque de l’information et je ne m’en suis pas senti plus mal, bien loin de là.
Je pense ne pas être un cas isolé à vouloir jeter aux ordures toutes ces turpitudes et ces horreurs dont le monde nous gratifie jour après jour, de la politique locale à l’internationale, je crois que cela nous met un peu à bout de nerf. Ici je peux dire « nous » parce qu’il est évident que je suis loin d’être seul à le penser et à l’exprimer. En effet dans tous ces grands titres de l’emballement médiatique on ne sait plus où donner des coups de têtes.
Entre un président de la République Française qui ne sait plus où se trouve le curseur de la laïcité [+] et une guerre de destruction massive autant que dramatique au Moyen-Orient [+].
À travers le récit affligeant d’une autre guerre en Europe de l’Est qui s’enlise grâce à l’industrie de l’armement [+].
Ou bien dans les lignes système médiatique consanguin [+] rempart des intérêts [+] du bloc bourgeois qui en France relaie et amplifie les attaques ad-nauseam d’une droite de sa gauche à son extrême qui lance toute sorte d’anathèmes décomplexés contre leurs ennemis [+].
Ou encore, cerise sur ce gâteau moisi la tenue d’un sommet qui – comme tous les ans – est sensé éviter la catastrophe écologique prévisible mais qui devient le grand marché mondial de l’extractivisme pétrolier et du nucléaire [+]. Avec cette « Storytelling » permanente des forces de la réaction bourgeoise, toujours prompte à discréditer [+] la moindre opposition à son business, en toile de fond.
Alors on dit stop et on passe ailleurs sans en penser moins !
Bien sûr c’est toujours un combat non négligeable de déconstruire les faits divers dont s’emparent l’extrême-droite et les médias dominants pour en faire un récit fantasmé sur fond de guerre de civilisation, de grand remplacement et de « wokisme ». Crepol est l‘exemple parfait de ce processus qui a profité de l’emballement émotionnel [+]. Ou encore de déconstruire les propagandes du capital comme quand il est annoncé que le niveau en math s’effondre en France et que c’est toujours de la faute des jeunes, jamais des coupes sombres dans les politiques budgétaires de l’Éducation Nationale [+]. Mais parfois arrêter de se mettre la rate au court-bouillon à cause de toute cette stupidité permet de préserver sa santé mentale !
C’est bien mon défaut tout de même de m’énerver sur la stupidité du monde. Ou sur sa supposée stupidité vu que mon affirmation sur cette stupidité est issue de ma propre analyse à l’aune de mes observations passées au moule de mes convictions. Tout ce que j’exprime est forcément subjectif. Et même si je m’essaye souvent à l’humour et à la métaphore de cuisine, la façon frontale avec laquelle je narre par mes écrits les soubresauts du monde des Sapiens montre à coup sûr mon engagement. Alors certaines autant que certains trouveront ou trouvent déjà que je ne suis pas aussi virulent quand je m’exprime dans ma pratique de l’art à travers mes médiums. Pour tout dire : je n’y arrive pas et d’ailleurs je trouverais cela fort déplacé et peu intéressant. Quoiqu’il m’arrive, surtout en atelier Imagerie de combat [+] de produire de l’image qui pourrait paraître forte.
En fait c’est toujours cette question de savoir ce qu’est un·e artiste engagé·e. Les engagements ne sont pas les mêmes pour tous, mais la chose est sûre que dès que l’on interroge le monde qui nous entoure on s’engage déjà dans un discours ou simplement une réflexion. Il y a des époques dans l’histoire contemporaine où les artistes et créateurs étaient engagé·e·s ainsi le film de Chris Maker [+] : « Loin du Vietnam » [+], réalisé dans les années 60 du XXe siècle en est un exemple incontournable.
Mais voilà en général quand on produit de l’image ou des formes, quand on pratique de manière sensée (ou non !) les arts visuels ou les arts plastiques voire les deux à la fois, on connaît la puissance évocatrice de l’image ou de la forme et les processus de signification qui peuvent se mettre en œuvre à travers.
Bien sûr certains de mes boulots en cours, comme l’installation en plein champs dont je vous ai rebattu les oreilles plus d’une fois, intitulée « microbassines » [+] que j’avais présentée il y a peu à Utoparc [+] et qui est d’ailleurs en cours de réfection suite à un vandalisme assez puéril et immature, renvoient à mes convictions à travers ce que je pense être des turpitudes de la gouvernance mortifère du monde par le bloc bourgeois. Et ce matin alors que nous sommes toujours en déficit de pluie dans la plupart des départements du Sud de la France et surtout d’Occitanie, sans me jeter des fleurs je me dis que ces boulots interrogent bien ces dérives des sociétés humaines, surtout ces dérives [+] à propos de la gestion de l’eau, ce précieux liquide indispensable à toute vie sur Terre.
D’ailleurs en parlant d’engagements, il y en a certains qui sont tellement ambivalents que l’on a du mal à s’y investir. En effet il y a peu j’ai suivi avec une forte attention la gestation d’un mouvement dans l’art sur les territoires occitans intitulé « La PEL » acronyme de « La Praxis Etnica Liura », visant à approcher la langue occitane à travers le prisme de la création visuelle et plastique. Un mouvement qui est né sous l’impulsion des artistes Joan Carles Codèrc [+] et Mélissande Artus [+], soutenu au départ par le magazine en occitan par Lo Diari [+] et s’appuyant sur un projet de galerie virtuelle [+]. Ce mouvement centré en Aveyron se veut fédérateur des énergies au-delà de la pratique simple de la langue occitane car il réfléchit à l’existence ou non d’un paysage plastique occitan – pluriel comme singulier-, sa visibilité et les discours, les esthétiques, qu’il met en œuvre. Mais aussi son histoire ainsi que les parentés et les parallèles qu’il pourrait nourrir.
Tout cela est très plaisant pour quelqu’un comme moi qui au fond de lui sent cette présence indispensable de la culture occitane, même écrasée par des siècles de francisation coloniale forcée et forcenée, même aussi si je ne pratique pas la langue et que j’avoue avoir bien plus parlé l’allemand ou l’anglais dans ma vie que ma langue grand-maternelle.
Ces artistes au début du printemps dernier ont lancé un manifeste , « La Crida »[+], à mon sens un bien intéressant appel à la rencontre d’artistes visuels et plastiques qui se situent dans l’aire de la culture occitane. La rencontre a eu lieu en début novembre, pour quelques raisons familiales je n’ai malheureusement pas pu m’y rendre. Ce fut bien dommage, mais je continue à suivre ce mouvement balbutiant avec attention soutenue.
À cet instant de cette Chronique du lundi vous devez vous demander de quel type d’ambivalence dans mes engagements il s’agit. Pour le coup je vais réitérer ici l’expression mon total engagement pour une humanité internationaliste autant qu’anarchiste, d’où l’ambivalence au plus profond de moi de cet intérêt porté par une affection ethnique pour ma culture vernaculaire. Alors il est clair que les artistes engagé·e·s dans cette démarche sont loin des relents moisis d’une quelconque secte identitaire nationaliste à la française et fasciste, comme il en existe malheureusement.
On sait aussi que l’histoire de la culture occitane est suspecte bien malgré elle depuis le XIXe siècle de véhiculer des valeurs fascisantes à l’exemple d’un Frederic Mistral qui tout prix Nobel qu’il fut était d’une affligeante clairvoyance politique, ainsi qu’on pourra le lire en suivant ce lien [+].
Heureusement plus tard, il y eu des penseurs occitans comme Felix Castan [+] bien plus ancrés dans une pensée de progrès social et culturel, avec la trame de fond de l’autonomie de la personne dans un mouvement de décentralisation culturelle, elle bien plus en phase avec les qualités humaines de la culture d’Òc.
Tout ceci me fait penser à ce que la Ville rose, capitale déchue dans le vent de l’histoire [+], a raté dans son histoire de l’art. Beaucoup d’artistes y ont traversé son espace de briques, beaucoup ont été oublié·e·s, d’autres sont parti·e·s ailleurs. Il est clair que jamais depuis le début des temps modernes elle n’a su préserver ses artistes. Je suis tombé l’autre jour sur une vidéo ici en lien [+] où l’on voit et entend l’artiste Henri Darasse [+] parler de son superbe travail : « Déco-Incidence ». Je vous parle d’Henri Darasse parce qu’il est, comme bien d’autres, diplômé de l’école des Beaux-Arts de Toulouse devenue Isdat [+] aujourd’hui. Une école où j’ai trainé un temps quelque peu mes Converses, qui est en très grand danger de disparition [+], comme beaucoup des structures de l’art de Toulouse.
Il est déjà bien tard pour moi, je vais être obligé de vous laisser. Thérèse [+] et les enfants sont déjà parti·e·s vaquer à leurs occupations respectives, la maisonnée est presque vide, il reste l’espiègle Louison la petite chatte de la famille. Je vais être obligé de la laisser aussi pour partir rejoindre mon atelier.
Je vous quitte avec une dernière image extraite d’une de mes vidéos de la série « No Show », comme depuis plus de deux mois. Celle-ci extraite d’un vidéogramme appelé « Hans Lucas » que j’ai réalisé en 2018. Vous retrouverez toutes ces vidéos dans le cadre de « Régal de Noël » [+] un événement autant foutraque que génial organisé par le formidable artiste et compère Stéphane Castet [+] du côté de Montauban, 3 impasse jean Bouin pour être précis. Stéphane ouvre les portes de son atelier au public pendant trois jours, les 15, 16 et 17 décembre 2023, vendredi, samedi et dimanche prochains donc. Il y embarque près de quinze artistes, n’hésitez pas à venir nous voir. Sinon à toutes celles et tous ceux qui ne viendront pas à Montauban ce weekend qui arrive, je souhaite virtuellement une chouette semaine. Quoi qu’il en soit, je donne rendez-vous à tout le monde lundi prochain pour une nouvelle Chronique du lundi… E sus aqueles mots vos disi addisiatz amigas e amics !

La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…
PhP

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