29.01.2024 – Chronique du lundi

29 janvier 2024 § 1 commentaire

Il faudra bien dépasser les baisers de la mort !

Il y a quelques jours je fouillais à travers le texte de mes nombreuses Chroniques du lundi que je compose depuis maintenant plus de trois ans et quelques mois. J’y cherchais ce que j’y avait narré sur telle ou tel autre artiste. J’y ai remonté mon temps. J’y ai évidemment trouvé : quelques fautes, des réflexions plus que bancales sur les bassesses du monde, une philosophie de comptoir voire de cuisine, des affirmations politiques hasardeuses, un parti-pris outrancier, mais aussi parfois : des positions courageuses parsemées de jolies formules. J’aime bien ces périodes où je vous plantais le décor de mon intimité en introduction à ma prose hebdomadaire, la subtilité du moment et la poésie parfois brutale de ce temps qui passe sous mes yeux.

Je viens de me lancer ainsi dans la chronique d’aujourd’hui sans même vous saluer ne serait-ce que par une minime formule de politesse et de bienvenue idoine autant que nécessaire au bon fonctionnement des relations sociales entre vous, mes chères et chers ami·e·s qui venaient vous confronter à mes mots, et moi qui suis en train de les poser dans mes lignes en ce 29 janvier 2024. Ainsi je vous demande de bien vouloir accepter mes sincères excuses et dans le même temps un chaleureux bonjour ou une bienveillante bonne nuit selon le moment de votre journée dans lequel vous accéderez au billet de ce jour.

Si vous me suivez depuis longtemps, ou même depuis peu, ou si vous approchez mes espèces d’éditos approximatifs seulement depuis le début de celui-ci, vous aurez peut-être compris que j’aime bien manipuler les mots et tordre les phrases à travers une grammaire douteuse et un vocabulaire parfois saugrenu. Je ne sais pas pourquoi aussi loin que je remonte dans mes souvenirs d’être humain, j’ai toujours aimé cela. Mais bizarrement cela me pèse et n’est pas si naturel que cela, alors que coucher des traits et des formes sur du papier, de la pellicule ou en volume, avec aucune autre volonté de formulation que d’exprimer sans mots les flux qui m’entourent et me traversent, ces flux ou interactions sociales qui font de moi un être pensant autant qu’humain, autrement dit « faire de l’art » [+] est mon seul horizon naturel pour questionner le monde dans lequel je vis. Bref j’écris en dilettante sans autre but que de coucher des mots et des phrases à l’accès simple comme un acte totalement amateur. Alors que je crée des objets réels ou virtuels sur des supports ou dans l’espace, que certaines autant que certains peuvent nommer « œuvres d’art » [+], comme autant d’objets non-narratifs qui n’auraient comme unique objet pour celles et ceux qui les approchent que d’être le déclencheur de leur propre narration et des interrogations qu’il se posent à propos du monde dans lequel ils vivent. Autant l’écriture éditoriale que je mène maintenant chaque semaine depuis donc trois ans et trois mois est un exercice somme toute simple et basique, sans effort intellectuel particulier si ce n’est de trouver les bons mots ou presque pour la situation du monde des Sapiens au moment où j’écris, autant quand je me lance dans la mise en forme d’un objet appelé « œuvre d’art » est un labeur extrêmement complexe et réfléchi qui convoque une réflexion et une « écriture visuelle ».

Alors aujourd’hui comme souvent dans ces chroniques du lundi, mes pensées courent vers les turpitudes du Monde. Et je regarde depuis mon nid douillet d’occidental repus tous ces conflits et ces guerres qui secouent la planète des humain·e·s. Je n’en suis pas fier et je me demande encore comment aider à leurs résolutions si ce n’est par le militantisme et la manifestation de mon mécontentement. Car aujourd’hui encore plus qu’hier comment les hommes et les femmes qui souffrent sous les bombes peuvent-elles ou peuvent-ils encore avoir confiance dans des institutions internationales inconsistantes, à l’image de résolutions [+] toujours en demi-teintes mais régulièrement en faveur des plus puissants [+].

Alors encore dans ce monde où les deux poids deux mesures s’appliquent sans vergogne que dire ? Comment soutenir le monde paysan quand il s’agit de ne rien rien cautionner des agissements violents et fascisants de la FNSEA ? Cette organisation syndicale qui se fout complètement de la détresse des personnes qu’elle est sensée représenter. C’est un peu comme si les ouvrières et ouvriers de l’industrie étaient représenté·e·s par le MEDEF. En fait il faut bien avoir conscience que cette organisation agricole ordolibérale a détruit et continue de sacrifier le monde paysan à l’hôtel du productivisme. On voit bien dans cette sombre affaire que la détresse du monde agricole est instrumentalisée par des empoisonneurs publics pour la diriger contre toute action écologique nécessaire non pas à la survie de quelques un·e·s mais à l’humanité toute entière. Les dangers à être militant·e écologiste et même élu de la République comme on peut le lire sur ce « thread » Instagram ici en lien [+] d’Alternatives Économiques [+].

On appréciera surtout le traitement [+] politique de la crise face au monde agricole par les élu·e·s et responsables de droite du centre à son extrême, et même celles et ceux de la gauche qui aiment bien les barbecues. Un traitement tout en démagogie et en annonces [+] qui ne fera rien d’autre que de continuer à enfoncer le monde paysan et renforcera les clivages [+] souvent artificiels entre écologie et agriculture.
Et dans ce monde du productivisme outrancier où l’on ne sait pas jusqu’où l’appât du gain peut amener, le monde de la pêche n’est pas plus étranger à l’imbécilité que celui de l’agriculture. Ainsi comme un exemple parmi tant d’autre, j’ai appris récemment sur une aberration écologique de plus avec ce projet « Lorient-Oman » dont je vous laisse prendre connaissance ici en lien [+], si vous n’en avez pas encore entendu parler.

Tout ceci dit, je dois vous confier qu’aujourd’hui, comme je vous l’avais laissé entrevoir succinctement la semaine dernière, quelques pénibles et récurrents soucis de santé ne me laisse que peu de latitude pour mes exercices éditoriaux du lundi. Car en plus de ces fatigantes douleurs persistantes et des périples qui en découlent au cœur d’un monde de la santé publique en totale déliquescence [+], je travaille sur quelques sujets de commandes pour gagner ma pitance quotidienne. Je ne suis juste que ce que l’on appelle un artiste-auteur [+], loin des aménagements dont bénéficient en France les artiste-interprètes [+] avec l’intermittence qui n’est tout de même pas le paradis des fainéants comme voudraient le dire tant de crétin·e·s ici bas. Mais même cela, en tant que plasticien je n’y ai jamais eu droit [+], et comme je vous en ai fait souvent part il me faut travailler ainsi que travaillent les artisan·e·s, en plus d’assumer mes choix de recherches et de production des mes propres « œuvres ». Et à deux jours de l’anniversaire de mes 62 ans de bons et loyaux services sur cette Terre, je me dis que ma retraite est bien lointaine et l’énergie je me dois préserver. Je ne resterai donc pas bien plus longtemps avec vous après cette ligne.

Je ne vais donc pas parler d’art aujourd’hui. Surtout pas s’il s’agit de narrer la rencontre d’une soupe de légumes et d’un célèbre tableau [+] de la renaissance. Je laisse cela aux vieilles grincheuses et aux vieux grincheux, tout autant qu’au jeunes con·ne·s. Le tableau va bien merci il ne risque rien, et ce n’est pas une première [+]. De fait j’ai parlé d’art à travers mes ressentis du début de ce présent billet, peut-être cela suffira-t-il ?

Mais juste avant de vous quitter je voulais partager une autre information glanée sur le web ces derniers jours. En effet savez-vous qu’il existe déjà des résistances aux usages intrusifs des Intelligences Artificielles ? Merci au CAAP [+] d’avoir partagé cette info sur « l’outil gratuit pour empoisonner les IA ». Sous le nom de Nightshade [+], ce nouvel outil logiciel gratuit développé par une équipe de cherch·eurs·euses au sein de l’Université de Chicago permet aux artistes de perturber les modèles d’IA cherchant à s’entraîner sur leurs œuvres, il est désormais disponible pour les artistes qui peuvent le télécharger [+] et l’utiliser sur toutes les œuvres d’art qu’ils jugent appropriées.
Mis en œuvre par les informaticiens du projet Glaze [+] sous la direction du professeur Ben Zhao, l’outil permet essentiellement de retourner l’IA contre l’IA. Il utilise le populaire cadre d’apprentissage automatique en libre accès PyTorch [+], paradoxalement développé par Meta (Facebook), pour identifier ce qui se trouve dans une image donnée, puis applique une étiquette qui modifie subtilement l’image au niveau du pixel afin que d’autres programmes d’intelligence artificielle voient quelque chose de totalement différent de ce qui s’y trouve réellement [+]

Voilà c’était ma minute numérique matinale numérique. Bien heureusement il y a des mois, que dis-je, des années que je me suis évadé de ces rivages digitaux autant que toxiques pour revenir à mes chers crayons. Mais il est dit que ce monde empli de 0 et de 1 restera longtemps en roue libre tant que le libéralisme sera son guide et qu’il sera toujours nécessaire de monter au créneau pour le cantonner dans son rôle de « pharmakon » [+] et de fournisseur d’outils utiles. Voilà sur ces paroles je pars vite déjeuner avec ma petite famille, ma chère et tendre Thérèse [+] en tête.

Je vous laisse, après cette courte et dernière chronique de janvier 2024, avec une image de mon temps jadis. Une image extraite d’une vidéo. Cette image fut toute faite avec des outils numériques et des ordinateurs dont la puissance de calcul paraissait époustouflante mais qui aujourd’hui ne seraient même pas capable de piloter un four à pizza connecté. Puis l’image en question qui s’animait sans fin dans un magnifique mouvement à base de Graphic Interchange Format Animé fut incorporée et travaillée en petit objet vidéographique sur des outils de montage vidéo analogiques pour un résultat qui fut à nouveau numérisée… Tempus fugit memento mori ! Addisiatz amigas e amics.

Capture d'écran de la vidéo de Philippe Pitet "Küß mich ..." - 1996
Capture d’écran de la vidéo-boucle « Küß mich … » – Technique mixte, montage vidéo analogique

La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…

PhP

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§ Une réponse à 29.01.2024 – Chronique du lundi

  • Suzanne dit :

    Cher Philippe. Pour en revenir au début de ton propos, n’aies pas  » honte » d’être plus spectateur impuissant occidental des dérives du monde, qu’acteur… quoique, la vigilance de ton écriture partagée, est une pierre concrète à la notre…
    500 millions de petits chinois, et moi et moi ? Disait déjà la chanson,voilà bien une génération…
    Bonne semaine à toi et à tes lecteurs ( et non, pas d’ecriture inclusive ce matin 😦
    Et que la révolte contre trop d IA, passe aussi, de l’art à … la manière.
    Sz

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