13.05.2024 – Chronique du lundi

13 Mai 2024 § Poster un commentaire

En grève !

Amies et amis amatrices autant qu’amateurs de mes Chroniques du lundi, cette chronique est celle du lundi 13 mai 2024. Soyez y bienvenu·e·s, mais avant toute chose sachez que je suis en grève !

Et oui je suis en grève dès ce petit matin et pour quelques heures parce que je m’inscris pleinement dans cette journée de mobilisation nationale en France contre la précarisation de l’enseignement supérieur artistique et pour une continuité des revenus des artistes-auteur·ices…

Alors que nous vivons des moments tragiques dans lesquels la dénonciation d’un massacre en cours proche d’un génocide est réprimée [+] comme jamais depuis 6 mois et que les forces de polices sont désormais déployées sans tabou [+] dans nos pays où la démocratie fond tristement comme la glace dans un cocktail avarié et où les néonazis défilent [+] sans entrave et sous l’œil bienveillant des forces de l’ordre, j’aurais pu être bien prolixe dans le présent exercice éditorial. Mais voilà : je suis en grève !

Dans mon billet de la semaine dernière je vous avais promis de vous en dire plus sur cette journée d’action et bien voilà vous en savez plus en écoutant ou en lisant ma Chronique du jour.

Non seulement l’enseignement artistique dans le parcours scolaire en France a toujours été l’après postpénultième roue de la charrette et son enseignement supérieur bien souvent laissé pour compte, mais aujourd’hui il est totalement mis en danger par des coupes claires insensées qui n’ont d’effets que de vouer à la fermeture [+] une grande partie des écoles d’arts sur le territoire de la République. Et évidemment en effet pervers collatéral comme à l’habitude, il sera mis en œuvre une nouvelle hyper centralisation de l’enseignement supérieur de l’art afin de faire perdurer la soi-disant excellence française tout en gommant la force de ses pluralités, sous prétexte qu’une seule école parisienne vaut mieux que cent qui irriguent le territoire. Bref je reprends le slogan que nous avions mis en œuvre il y a déjà quelques années au sein des Arts En Grève [+] : « Plus d’écoles d’art, moins d’écoles de commerce ! ».

Et puis nous savons bien que le budget des arts visuels dans celui de la culture en général étant traditionnellement une sorte de peau de chagrin, depuis les annonces de restrictions [+] faites par notre auto-satisfait ministre de l’économie nous pourrions redouter le pire, hélas vous devez savoir que ce pire nous concerne depuis longtemps. Car zéro moins zéro fait toujours zéro. Alors c’est peut-être pour cela que lors de cette journée d’aujourd’hui nous nous mobilisons en tant qu’artistes-auteur·ices pour une continuité de nos revenus. Je vous en ai déjà parlé, j’y reviens en vous envoyant vers ce lien [+] qui vous en dira plus.

Voilà sur ces paroles sûrement un peu simplistes, je vais vous laisser pour aujourd’hui avec une image d’un travail en cours mais un jour de grève, car comme vous le voyez : sans continuité de revenus je suis obligé de travailler [+] pour gagner ma vie des fois bien au-dessous du seuil de pauvreté. Une métaphore opportuniste de l’expression « vogue la galère » qui est trop souvent le lot journalier de l’artiste-auteur·ice. Et ce n’est pas une blague pour celles et ceux qui croient encore que les artistes sont des privilégié·e·s qui exercent un « métier passion ». Nous avons choisi de pratiquer l’art en professionnel·le·s, c’est un secteur de l’activité humaine qui se trouve la plupart du temps loin des radars de l’économie capitaliste, c’est tant mieux. Sauf que notre travail est bien souvent aussi pillé par cette dite économie sans en avoir un juste retour.

Car bien sûr l’économie de l’art [+] est intimement dépendante de l’économie capitaliste financière. De fait l’art d’aujourd’hui est soumis aux dictats du bloc bourgeois. La preuve avec les soubresauts au Palais de Tokyo et cette administratrice grande bourgeoise qui démissionne [+] en grande pompe aux prétextes que cette institution est tombée sous la coupe du wokisme, des fanatiques de la cause palestinienne, de la culture queer et trans. Sans parler de l’islamogauchisme qui rôde en ces lieux, fort heureusement on n’ose plus parler de judéomaçonisme de nos jours. Alors que quand on regarde de près la révolution reste loin des murs de ce temple de l’art contemporain en France qui a donc du mal à se permettre quelques saillies subversives. Cet épisode reste fort heureusement bien risible, tant est qu’il n’est qu’une tempête dans un verre d’eau, malgré les dizaines de milliers de personnes qui ont « likées » et donc approuvées les termes de cette tonitruante démission aux accents de l’extrême-droite. Et que l’on peut imaginer le chemin à parcourir pour entrer un peu de raison dans les cerveaux obtus de mes concitoyen·ne·s.

Avant de tirer ma révérence pour ce jour, afin de documenter cette grève qui me mobilise, et à destination de celles autant que ceux qui ne comprendraient rien à la situation, je vous laisse lire le fameux Rapport Racine, ici en lien [+], un rapport qui n’a pas pris une ride en 4 ans. Car depuis rien n’est toujours fait pour améliorer cette dite situation des artistes-auteur·ices, particulièrement quand ces derni·ers·ères œuvrent dans les champs des arts plastiques et visuels. Je vous laisse aussi dans cet autre lien [+] l’excellent « Notre Condition » du non moins excellent Aurélien Catin [+], dont je vous avais déjà dit tout le bien que j’en pensais en son temps et qui lui aussi n’a pas pris une ridule. Et enfin pour le combat du moment présent, je vous laisse prendre connaissance d’une tribune de « La Buse » [+] à propos de la continuité de revenus pour les artistes-auteur·ices, en suivant ce lien ici [+].

Et puis pour tout vous avouer ce matin Thérèse [+] et moi sommes redescendu·e·s de Die, de nos chères montagnes et des bords de Drôme. Tristesse de ne point pouvoir y être resté·e·s plus de temps. Alors je n’ai point trop le moral à vous narrer la vie qui passe sous mes yeux. Pour le coup la grève me va d’autant mieux. Juste à vous signaler qu’à Recoubeau très jolie localité en remontant vers les sources de la Drôme vers Luc-En-Diois, se tient un espace bien agréable qui a pour nom : la « Maison Oiseau » [+]. On y trouve la formidable chocolaterie Yêrê [+], un chocolat qui vient directement et équitablement de ma très chère Côte d’Ivoire. Mais ce n’est point pour ces fantaisies chocolatées que je vous parle de ce lieu atypique, je vous en dis un mot car on peut y voir en ce moment une très belle exposition de la formidable photographe Sophie Guin [+], à voir jusqu’au 16 juin.

Sans continuer plus avant, car il me semble vous avoir bien seriné que je faisais grève, je vous quitte donc sur votre faim. Et comme il est malheureusement de mise au cœur de nos conditions d’artistes plasticien·ne·s : « vogue la galère ! »… Ce qui fera lien avec l’image que je vous partage ce lundi dans ce billet.
Du coup ça vous laisse du temps pour remonter le cours de mes Chroniques du lundi et pour lire celles que vous n’auriez pas encore lues. Depuis le 19 octobre 2020, il y en a 188 si mon compte est bon. « Hop là, hop là ! » comme le dirait un certain René Magritte [+], je pars vite manifester mon mécontentement en compagnie de mes collègues d’infortune. À lundi prochain, addisiatz amigas e amics.

Photographie de grève par Philippe Pitet artiste plasticien - 2024
« En grève ce jour », affiche de grève devant maquette d’élément de décors en cours de réalisation. Photographie furtive de grève – 2024

La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…

PhP

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