02.06.2025 – Chronique du lundi

2 juin 2025 § Poster un commentaire

Sous une triste pluie de printemps !

Ce matin devant le clavier de mon ordinateur, alors que je finis la rédaction de cette nouvelle Chronique du lundi, je me pose la question de l’intérêt qu’elle peut susciter parmi mes lectrices et mes lecteurs, tout comme auprès de mes auditeurs comme mes auditrices. En ces dernières semaines de l’année scolaire, avant la saison estivale, je termine la 5^e saison de ces chroniques du temps qui passe sous mes yeux. Cinq saisons sans rater un seul lundi. Avec une assiduité enthousiaste presque à chaque fois, malgré quelques faux pas de lassitudes. D’autant que depuis le début de la saison radiophonique qui se termine, ces Chroniques du lundi sont devenues les éditoriaux officiel de ma très chère Radio FMR [+] de Toulouse. Après avoir été parfois embarquées en loucedé sur ses ondes et ses électrons les quatre années précédentes. Avec ce billet du jour voilà 242 fois que je vous assomme de mes considérations pas toujours très modérées et quasiment jamais objectives, mais particulièrement imprécises autant qu’imparfaites !
Comme je le dis depuis des mois et des années en introduction écrite ou parlée de ces interventions chaque 1^er jour de semaine, je rédige ces dites considérations approximatives tout au long de la journée du lundi, commençant tôt le matin pour livrer mes élucubrations hebdomadaires sur le monde de Sapiens avant que l’horloge n’atteigne la première seconde du jour suivant. Alors sur cette fin de printemps et avant le farniente de l’été, il est temps que je prévois la saison prochaine. Il se peut que cette formule change, et ainsi que je l’anticipe (à peine !) aujourd’hui : l’écriture de mes Chroniques du lundi se feront les jours précédents pour être publiées et diffusées en début du dit jour.
Mais je bavasse sans fin en regardant mon nombril alors que, chères lectrices et auditrices, chers auditeurs et chers lecteurs, je ne vous ai même pas souhaité une chaleureuse bienvenue d’usage sur cette Chronique du lundi 2 juin 2025.

Bon alors vous l’aurez remarqué l’actualité de nos société humaines n’en finissent pas d’étonner tant l’imbécilité y règne en maitresse. C’est un peu ce que j’exprime billets après billets depuis tant de mois et tant d’années. Cette semaine qui vient de passer n’a pas échappé à cette funeste tradition. Ce n’est pas nouveau et je pense comme beaucoup que depuis que Sapiens a inventé la propriété et l’exploitation de la propriété à des fins spéculatives le schéma de la violence et de la domination entre les humain·es est devenu immuable. Et les génocides qui se déroulent sous nos yeux, particulièrement en Palestine, au Darfour ou encore au Congo, sont des exemples terribles de cette folie stupide qui mène le monde.

Un monde où l’on a l’impression que plus rien n’arrête toutes ces femmes et tous ces hommes qui n’ont que la haine au fond du cœur. Le grand cirque du festival de Cannes s’est terminé la semaine dernière. Malgré toute la vacuité commerciale d’un tel événement, il aura tout de même permis de mettre le projecteur sur l’assassinat, il y a moins de deux mois, de la photographe-journaliste Fatima Hassouna [+] tuée par une armée israélienne en roue libre à Gaza depuis des mois et des mois. On n’oublie pas que près de 200 journalistes ont disparu à travers les fameuses « attaques ciblées » qui sont le lot de ce génocide. Ce n’est pas moi qui l’affirme mais bien l’ONU [+], tout comme ce décompte macabre des près de 60000 personnes dont 15000 enfants officiellement passés par les armes de destruction massive, les plus de 120000 femmes, hommes, enfants comme vieillards mutilé·es, grièvement blessé·es, entre la vie et la mort. Sans compter aussi les près de 500000 personnes confrontées à des conditions de famine directe la plus élevée selon les échelles de risque internationales. Sans compter enfin que c’est la totalité d’une population de deux millions d’habitant·es qui souffre d’insécurité alimentaire et sanitaire totales sur cette bande de terre de 40 kilomètres sur même pas 10 de largeur moyenne. Je ne galèje pas, je ne répète pas la propagande du Hamas, il suffit d’aller vérifier sur le site de l’UNICEF [+] pour se rendre compte de l’ampleur du drame. C’est simple, pas besoin de se perdre en conjectures devant la voix de son maître télévisuel. Juste pour info : sur les 19 équipements hospitaliers que comptait ce territoire il y a à peine deux ans, deux restent à peine opérationnels et 95 % des écoles ont été détruites. Toi qui m’écoutes ou qui me lis, tu prends ces chiffres et tu les appliques à un territoire de type Aix-Marseille et tu imagines une zone détruite avec même pas une maison, un immeuble, un bâtiment debout sur trois et des gens qui y errent en lambeaux.

Avant de vous parler d’autre chose que de ces horreurs que nous réserve le monde des hommes et des femmes de mauvaise volonté, je vais revenir juste en quelque mots sur une actualité française avec deux délires, une belle inculture et des mensonges éhontés au plus haut de l’état…

Le premier délire est bien ce triste scandale qui se joue sous nos yeux avec le feuilleton des travaux de la fameuse autoroute inutile au numéro 69. Une reprise des travaux illégaux [+] décidée par une justice qui se contredit quasiment, et a du mal à affirmer le droit qu’elle est sensée donner tant les pressions sont énormes. Doit-on aussi se rappeler à quel point cette justice, même si elle est loin d’être uniforme, est l’apanage des puissant·es et reste ancrée dans l’ordre du capitalisme et de la hiérarchie des classes. Et puis en parallèle nous voyons une offensive parlementaire [+] toujours pilotée par ce bloc bourgeois prêt à tout afin de sauvegarder ses profits face au bien commun. Des manipulations en tout genre de la part d’une droite et d’une extrême droite locale habituée aux magouilles qui plonge ses racines tout comme ses ennemi·es dans le béton, avec la complicité d’une gauche cassoulet affairiste et son organe officiel qu’est l’inénarrable « Détresse du Midi ». Tout cela fleure les bons gros scandales que l’on étouffe sous le tapis de vie brisées, d’exactions environnementales et de mépris social. À l’heure où les engagements écologiques dont dépend notre survie sont criminalisés, on ne pourra que soutenir celles et ceux qui luttent face à ce grave délire mortifère d’une bourgeoisie séparatiste forcenée. On ne pourra qu’admirer le courage du formidable Thomas Brail [+], opposant historique à ce chantier inutile qui annonce entamer une grève de la soif [+] à la reprise des travaux. Et puis aussi, tout le monde pourra se faire une opinion sur le point actuel de l’affaire juridique autour de la A69 en lisant l’article : « Reprise des travaux de l’autoroute A69 : tout comprendre du point de vue juridique » [+] sur le média indépendant de l’écologie en action « Bon Pote » [+].

Ensuite, dans les actions délétère de cette bourgeoisie française qui semble se vautrer en pleine démence, il y a cette histoire d’un rapport dont je vous ai déjà entretenu de quelques considérations dans mon précédent éditorial du temps qui passe sous mes yeux. Un rapport officiel tout autant islamophobe qu’il est vide de ce qu’il est sensé démontrer. Un rapport qui semble sorti d’une vision complotiste des plus délirante. En effet, non seulement ce document officiel du ministère de l’intérieur au sujet d’un soi-disant entrisme des frères musulmans qui mettrait en péril notre belle République Française est consternant de vacuité, mais il coche toutes les cases du complotisme ainsi que nous le démontre avec brio le dernier numéro de l’émission « Rhinocéros » [+] sur le média indépendant Blast [+], dont je n’aurai de cesse de vanter l’excellente qualité de travail d’investigation journalistique. Une émission que l’on retrouve sur la plateforme de vidéos à la flèche blanche sur fond rouge, sous le titre : « Entrisme frériste : l’offensive complotiste et islamophobe » [+]. C’est à voir et écouter tant l’analyse est salutaire face à toute cette folie. Et comme le disent les deux animateurs de ce magazine vidéo on se demande ce que fait le fameux site Conspiracy Watch [+] face aux relents conspirationnistes de la parole officielle de l’état. Ah oui c’est vrai, j’oubliais le fameux deux poids deux mesures !

De la folie et des délires nous en avons été bien abreuvés encore dernièrement dans une affaire qui montre à quel point la convergence de l’inculture avec les algorithme de ce que l’on appelle l’intelligence artificielle peut devenir ridicule et stupide. Sauf que la stupidité n’est jamais neutre et paraît dangereuse tant elle nous amène vers les pentes glissante de l’idiocratie. Pour revenir au fait, peut-être avez-vous entendu parlé d’une vidéo qui était sensée célébrer la résistance et la victoire contre le nazisme ? Un petit film produit par le SIG – Service d’Information du Gouvernement – sous la tutelle directe du 1^er ministre du gouvernement français. Une vidéo toute générée par une de ces fameuse IA, sans acteurs, sans techniciens, conçue à travers un prompt à coup sûr lapidaire et qui en quelques secondes devait illustrer les risques que prenait une résistante dans la clandestinité de l’occupation jusqu’à l’ivresse de la libération, sous le titre assez racoleur « POV : tu es une femme résistante de la seconde guerre » [+], P.O.V. pour l’acronyme anglais de Point Of View, en français Point De Vue.
Et là patatras ! Sur la vidéo générée et diffusée mardi dernier 27 mai 2025, apparait à travers la foule en liesse fêtant la libération : un soldat allemand avec son beau casque de la Wehrmacht, ainsi qu’un drapeau japonais pavoisant dans le fond, comme le fait remarquer « L’Humanité » [+] dans son article : « C’est comme si on privatisait le discours historique mémoriel : le gouvernement publie – puis supprime – une vidéo sur la Résistance générée par IA et truffée d’erreurs » [+]. Il a fallu que des yeux vigilants sur les réseaux sociaux s’émeuvent de ces grossières erreurs pour que ce « short » de 27 secondes soit supprimées. Tragiques méprises qui montre encore et toujours que confier les choses sérieuses à des imbéciles est une belle marque de fabrique du macronisme, comme nous le rappelle « Contre-Attaque » [+] dans son article intitulé : « L’intelligence artificielle et les macronistes confondent le nazisme et la résistance » [+].

Bon je vais laisser de côté tous ces stupides soubresaut de l’actualité humaine, non sans avoir dit deux mots à propos d’un 1^er ministre du gouvernement français qui persiste et signe dans sa logique de mensonges éhontés et sans limite au sujet d’une affaire qui aurait dû l’amener à démissionner voire sur les bans d’un tribunal. Après avoir fait le mariole devant une commission parlementaire et avoir essayé de discréditer celles et ceux qui lui demandait des comptes, ce dernier avait annoncé face à la représentation nationale qu’il allait nous donner les preuves flagrantes de sa bonne foi dans cette sombre et explosive affaire Bétharram [+]. Évidemment aucune preuve et aucun document qui n’était déjà connu n’a été produit par ce « serial liar » patenté. Nous avons même eu droit à une hallucinante séquence autour d’un prétendu piratage de son site web. C’est pathétique et je ne m’étendrais pas plus sur le sujet. Je vous renvoie sur l’excellent décryptage de ce rebondissement avorté de l’affaire par le formidable Clément Viktorovitch [+] sur sa chaine YouTube sous le titre : « La folle histoire du piratage de François Bayrou (spoiler : c’est ÉCLATÉ !) » [+].

Pendant ce temps là, à l’heure de la post-vérité déclinée à la française, un ministre de l’intérieur aux accents extrémistes nous parle de hordes barbares pour décrédibiliser des supporters parisiens qui ont pris fait et cause pour la libération de la Palestine [+]. Mais au lieu de déplacer le débat il faudrait le remettre dans son paradigme. Il faudrait bien admettre que le capitalisme consumériste crée le besoin par l’envie et détruit les cerveaux. Rien d’étonnant que des décérébrés s’en prennent à des marques de luxe et pillent les beaux magasins des Champs. Et tout compte fait le détournement d’attention est bienvenu pour le bloc bourgeois. Pendant ce temps là les faits divers sordides se multiplient et un nouveau crime raciste autant qu’islamophobe vient de se produire [+] le 31 mai quelque part du côté du Var où un homme de 53 ans a tiré à plusieurs reprises sur deux de ses voisins. L’un de ces voisins était tunisien, il est mort. L’autre voisin est turc et est grièvement blessé. Juste après l’agresseur a posté sur les réseaux sociaux des vidéos à caractère raciste. À l’heure où je rédige cette Chronique du lundi, la police hésite encore à qualifier l’acte d’acte raciste !

Cette dernière affaire montre à quel point toutes celles et ceux qui ont joué avec le feu de la stigmatisation raciste à des fins électorales sont coupables de ces exactions. Cela me fait penser à cet excellent sujet du fameux Seumboy sur la non moins excellente chaîne YouTube « Histoires Crépues » [+], sujet intitulé : « Le racisme « bienveillant » des politiques français » [+], bienveillant étant évidemment entre guillemets. Assez étonnement (ou non !) est la perspective de ce sujet avec ce que nous dit le festival d’art contemporain phare à Toulouse : Le Nouveau Printemps [+]. Un Nouveau Printemps qui dans son édition 2025 est pensé cette année avec Kiddy Smile [+]. J’avais bêtement imaginé le pire. Je suis heureux de m’être méchamment trompé. Kiddy Smile est artiste multi-facettes qui se trouve au centre de ce que l’on appelle en sociologie : l’intersectionnalité. Pour rappel : « […] L’intersectionnalité ou intersectionnalisme est une notion employée en sociologie et en réflexion politique, qui désigne la situation de personnes subissant simultanément plusieurs formes de stratification, domination ou de discrimination dans une société. […] ». Quelque chose de ce fameux « woke » honni par le bloc bourgeois. Une exploration sensible que nous essayons de mettre en œuvre, malheureusement trop peu souvent, avec quelques autres artistes dans notre groupe « Imagerie de combat » [+]. Pour revenir à Kiddy Smile, c’est vraiment formidable de voir des artistes loin des normes s’emparer de ces sujets éminemment politiques.
Si vous n’avez pas encore approché cette édition en cours du Nouveau Printemps, il vous faut absolument le faire. Je n’ai pas encore tout vu, ni tout visionné, car beaucoup d’œuvres à découvrir sont de formidables labeurs vidéographiques, mais ce que j’ai approché et capté de tous mes sens est parfait de justesse et de puissance réflexive autour du racisme, du colonialisme, de la vision des autres, de la domination, l’appropriation des corps ou des consciences et j’en passe. Une très chouette exploration et réflexion sensible qui vole à dix-mille lieux de la vacuité contemporaine. Encore bravo pour ce boulot, cela faisait longtemps que je n’avais pas ressenti autant d’intérêt à voir de l’art. Si vous êtes dans la capitale occitane ou si vous vous y rendez, vous avez jusqu’au 22 juin 2025 pour visiter les œuvres présentées dans le cadre de ce festival d’art contemporain. Vous pouvez trouver tout le programme sur le site web lenouveauprintemps.com [+].

Voilà il est midi passé, je vais déjeuner avec ma chère et tendre Thérèse [+], puis me mettre derrière un micro pour enregistrer ce billet du jour afin de la diffuser sur les ondes de la Radio FMR [+] de Toulouse. Si vous l’entendez à travers ma voix c’est que j’aurai réussi le plan jusqu’au bout. Pour celles et ceux qui viendrait sur le texte de cette première chronique de juin 2025, sur mon site web philippepitet.com, comme depuis trois semaines, je vous laisse avec un autre dessin de ma série « Slow Gangs die Symphonie der relativen Utopien », je ne sais pas pourquoi mais ça cadrait bien avec ce texte. Bonne semaine et comme je vous le dis à chaque fois dans mon occitan approximatif mais sincère : a diluns venent, addisiatz amigas e amics !