03.04.2023 – Chronique du lundi

3 avril 2023 § Poster un commentaire

Beaucoup de vent, peu de pluie… Mais surtout de l’amour !

Chères et chers lectrices, lecteurs, auditeurs, auditrices, internautes qui entrez sur ces premières lignes de ma Chronique du lundi 3 avril 2023, soyez toutes et tous, « toustes » comme on dit aujourd’hui, les bienvenu·e·s.

En français, puisque c’est la langue dans laquelle je m’exprime à travers ces exercices éditoriaux hebdomadaires, le féminin de fraternité est un mot dont je trouve la consonance assez dure. Cela se dit sororité, avec les mêmes déclinaisons que pour fraternité, c’est à dire sororellement, sororel, sororelle. Ces mots mettent d’ailleurs en transe les correcteurs orthographiques de nos appareils modernes tout autant que celles et ceux qui croient que le monde mijote dans le grand remplacement des « forces du mal wokiste ». Je vous parle de sororité en guise d’accueil à cette présente chronique car je voulais vous y souhaiter une chaleureuse et fraternelle bienvenue, mais en fait comment pourrais le faire si les termes de la langue que j’utilise me coupent de la moitié de mon humanité. Alors oui je peux vous exprimer un chaleureux et fraternel tout autant que sororel bonjour.
Mais ce n’est pas une formule très heureuse quand on cherche l’harmonie des mots dans ce petit matin perturbé d’avril. Bref il y a des fois où nous ne sommes non seulement pas content des limites de notre capacité à dire le fond de nos pensées sincères, mais aussi de ces frontières bien fragiles où l’on a du mal à contenter le monde auquel on s’adresse.

Toutes les langues ont leurs limites, le français est une langue extrêmement agréable à manipuler mais relativement pauvre [+]. Je sais qu’en disant cela je vais en faire « chevrer » plus d’un·e, mais oui et je l’ai déjà narré dans une ancienne chronique, il y a par exemple plus de mots de vocabulaire en anglais qu’en français. La langue de Molière n’est donc pas trop bien lotie en ce qui concerne son vocabulaire, ce qui n’est pas grave en soi vu le faible nombre de mots en usage chez nos compatriotes, mais elle l’est surtout dans sa capacité à concevoir un monde plus féminin. Ce qui n’est pas neutre pour la pensée. Et à me plonger dans la philologie [+] du français je constate que tout ceci conforte in fine une société hexagonale (comme outre-marine !) dans une tradition générale bien masculine. Voilà donc pour ce bref et succinct passage autour d’une philosophie du langage [+] de comptoir, juste pour vous dire à quel point je trouve difficile l’écriture certains lundis matin.

J’avoue qu’en fait la langue dans laquelle je m’exprime est loin d’être mon unique difficulté à fournir et développer un récit hebdomadaire sur les turpitudes de notre temps et sur l’évolution de notre civilisation de Sapiens. Je m’exprimerais dans des idiomes bien plus riches comme l’allemand ou l’occitan ce serait la même chose. C’est ainsi depuis plusieurs semaines. Peut-être après tout n’ai-je plus grand chose à dire. Suivre l’actualité désespérante du monde ne m’inspire que de noires pensées, les narrations éditoriales en subissent la déliquescence.

Ainsi par exemple en France, ce moment surréaliste de la vie publique dans cette République en pleine tourmente, fini par me faire plus pleurer que rire. Les gouffres voraces et immondes qui se creusent me terrifient, les bras m’en tombent
Un président assiégé, qui va finir par ne plus sortir de sa tanière élyséenne, au risque de le voir grimper aux rideaux façon Deschanel [+]. Pourtant il paraissait bien sympathique aux yeux de ses concitoyen·ne·s il y a maintenant 6 ans, ce jeune et fringant président qui disait vouloir sauver la planète, mais qui se révèle être un vrai autocrate au service des pires sévices du capitalisme en bande organisée.
Et pendant que l’état tabasse et mutile, tue parfois en France [+], ayant même l’impudeur de convoquer Max Weber [+] pour légitimer sa violence [+], des banques françaises plongent dans la tourmente. Banques qui ont détourné [+] des milliards d’euros permettant au bloc bourgeois de dévoyer des dizaines, voire des centaines de milliards d’euros, qui se retrouvent évaporés dans la nature des paradis fiscaux. Même si les sommes sont colossales, malgré le préjudice [+] irréversible pour une société humaine qui étouffe, nos banques nationales risquent juste un petit milliard de redressement sur l’affaire. Tout cela restera quoiqu’il en soit une bonne opération pour les bénéficiaires de ces détournements assassin.
Et comme si toute cette ignominie ne suffisait pas, l’état et son gouvernement se targue d’être à la manœuvre alors qu’ils a tout fait pendant des années pour faciliter ces pratiques de détournements financiers.

Et pour finir dans cette tragique soupe de confusion généralisée, où l’on doit recadrer des forces de l’ordre en roue libre à l’image de ces fameuses unités motorisées de répression dont une pétition parlementaire ici en ligne [+] en demande la dissolution, on retrouve une ministre dans Playboy et un président dans Pif Gadget, tout ça autour du premier avril !
Alors même que le fond mis en place par cette fameuse ministre-playmate afin de lutter contre le radicalisme religieux sur le web se retrouve au cœur d’une méchante affaire là aussi de détournement [+]. Des faits en France qui s’enchaînent à grande vitesse et qui montrent à quel point nous arrivons au bout d’un système devenu intellectuellement invivable et où la vacuité s’est hissée au rang de valeur fondamentale.

J’arrive à la fin de cette chronique du jour alors que je n’y ai parlé que des travers d’une société qui nous enfume de ses turpitudes et sans vous avoir parlé d’art. J’en suis désolé, mais pour tout vous dire mon état de santé un peu mis à mal la semaine dernière par quelques agressions externes autant qu’internes, ne m’a pas laissé trop de temps pour m’intéresser à ces choses de l’art qui restent le pilier central de mes réflexions autant qu’un des moteurs de mon appétence à exister. Même si je l’avoue aussi avec délectation, le moteur principal dans cette existence d’être humain que j’essaye de vivre au mieux tous les jours malgré les obstacles qui s’efforcent obstinément de restreindre les possibles de mon univers, reste ces merveilleux moment de vie et de connivence que je partage depuis des années avec ma chère, adorable et merveilleuse Thérèse [+]. Après tout, tout cela demeure de l’art.

Et avant de vous quitter pour aujourd’hui, je voulais quand même glisser ici quelques mots qui traînent depuis déjà deux semaines dans mes notes. Des mots pour vous dire tout le bien que je pense de l’exposition en cours dans cette adorable et géniale petite galerie Kloug [+] à Toulouse tenue par les non moins géniaux et admirables Élise Pic et Jacques Barbier. L’exposition s’intitule « Coloriages Photographiques ». Ce n’est pas la première fois dans mes Chroniques du lundi que je vous entretiens de cette galerie toulousaine et des délicieuses personnes qui l’animent, et ce sera loin d’en être la dernières. Ainsi que la vocation du lieu l’annonce, cette nouvelle exposition montre des séries de photos vernaculaires chinées par Jacques. Des photos qui tout au long de cette histoire de la photographie anonyme, nous font voir la vie des femmes et des hommes avec tendresse et bienveillance, celles de cette expositions sont évidemment colorisées, comme l’indique son titre. En parallèle à ces séries de photos, Jacques et Élise ont invité l’artiste Claude Guénard [+] à exposer une série de photos anciennes de mariage. Des images d’un temps passé, chinées aussi dans les bacs de puces diverses, qu’il a rehaussées et détournées de ses traits de peintre. Cette série est exposée sous un titre qui oscille entre Marcel Duchamp [+] et Max Ernst [+] : « La mariée mise à nu », dans ce jeu du désir et de la passion, mais aussi de l’amour que sont les mises en scène des photos de couples le jour du mariage. Je ne connaissais pas Claude Guénard personnellement, un artiste sincère, un aventurier aux mille vies, un personnage haut en couleur tout autant que passionnant. Claude fut, entre-autres, professeur au sein des Beaux-Arts d’Abidjan en Côte d’Ivoire au début des années 80. J’ai eu grand plaisir à le rencontrer le soir du vernissage de l’exposition [+] à Kloug. Nous y avons échangé longuement à propos des relations fortes qui nous lient respectivement au continent africain, et particulièrement avec l’Afrique de l’Ouest, des relations communes que nous y avons et avions. Bref un chouette moment qui me fait dire que j’ouvrirai avec vous très bientôt une série de considération autour de l’art actuel dans ces formidables contrées africaines qui sont loin d’avoir été et d’être hors de l’histoire des sapiens, malgré ce que veut nous faire croire nombre de néo-colonialistes.
Pour info avant de clore ce dernier chapitre de l’exercice éditorial du jour ces derniers mots pour vous annoncer que Claude Guénard fait partie des 50 artistes de l’exposition « Picasso, 50 ans déjà » Du 8 avril au 10 juin 2023 à l’Espace culturel Marc Jacquet de Barbizon [+]. Sinon pour les toulousaines et les toulousain l’exposition à la galerie Kloug est visible jusqu’au 29 avril 2023.

Sinon l’homme orchestre qu’était Ryūichi Sakamoto[+] est mort il y a quelques jours et je trouve cela bien triste. La vie continue tout de même à travers ce printemps que j’espère être marqué par de belles victoires sociales.
Pour faire écho à ce dont je viens de vous narrer à propos de ma récente rencontre à la galerie Kloug, je vous laisse avec des reproductions de vieux boulots du temps où les influences d’un monde encore sauvage et où ce que j’avais appris autour des tropiques étaient plus que prégnantes. Rares traces qui me restent de boulots anciens, du temps où je signais « Kinou » ou encore « KinouRendFou », images retrouvées la semaine dernière au fond de mes archives tarnaises. Des dessins à l’encre de Chine noire et rouge sur papier Canson à grain, faisant partie d’une série montrée lors de l’exposition « Les Irradiés de Tchernobyl » en 1986. Je vous souhaite une belle semaine d’avril et vous donne rendez-vous dès la semaine prochaine, même protocole de rencontre. Adissiatz

Photos de dessins de Philippe Pitet artiste plasticien réalisés pour l'exposition "Les Irradiés de Tchernobyl" - Toulouse 1986
Série de dessins, « Les Irradiés » • 1986 (papier et encre de chine) – Series of drawings, « Les Irradiés » • 1986 (paper and indian ink)

La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…

PhP

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