12.07.2021 – Chronique du lundi
12 juillet 2021 § Poster un commentaire
Un peu de pluie, de fraîcheur, d’amour et quelques orties…
Amies et amis internautes, lectrices et lecteurs de mes chroniques du lundi, bienvenue dans mon nouvel éditorial du temps qui passe sous mes yeux en ce lundi 12 juillet 2021.
Un lundi placé sous le signe de ce terrible variant Delta qui lui n’a pas trop l’air de passer.
Un peu comme le rebondissement inespéré dans la tragédie humaine qui se joue sous nos yeux. Le temps passe effectivement, mais en cette journée de conseil de défense martial et d’annonces qui s’annoncent fortes, les ressorts de la peur restent les mêmes et sont prêts à délivrer le maximum de leurs puissances.
Aujourd’hui je serai bref, ne serait-ce parce que je m’octroie quelques jours de vacances méritées dans ce temps qui passe à toute berzingue.
En parlant du temps qui est passé à travers tant de crises jusqu’à cette période embrumée par ce drame tout aussi burlesque que pandémique, je m’aperçois que j’y ai vécu une vie à amasser les idées comme les objets sans savoir vraiment les organiser. Un peu comme si je n’avais jamais su les mettre en œuvre sur le moment, en me disant toujours que j’en ferai bien quelque chose un jour.
C’est une des règles, une constante de ces chroniques : j’écris, je dis, je divague en passant du coq à l’âne, passant d’une idée à une autre sans développer plus que cela les processus entamés les semaines précédentes. J’y empile des tentatives en tout genre, me cantonnant à l’effleurement de leur exercice. Je vous laisse sur la faim car en fait cet exercice d’écriture hebdomadaire me sert aussi de carnet de notes à la fin des fins.
J’ai des idées qui me trottent dans la tête, tous les jours, toutes les nuits, sans discontinuer, sans me laisser de répit. Ces fragments narratifs divaguent dans mon imagination depuis que mon cerveau est capable de restituer des souvenirs réels ou fantasmés. Je les couche sur papier depuis que j’ai 5 ans, depuis que j’ai commencé à écrire, ou plutôt que j’ai su documenter proprement mes dessins.
J’en ai écrit plein de ces carnets qu’ils soient reliées ou compilés. J’ai griffonné, dessiné, écrit sur papiers libres, post-its et autres coins de nappes en papier. Des bouts d’une pensée furtive, savamment classée (ou non !) à l’intérieur de veilles pochettes de feuilles à dessins, à travers des cahiers ou à autres calepins qui jaunissent depuis les années 60 du 20e siècle pour les plus vieux, autant dire depuis l’âge de pierre.
Je n’ai dû mettre en œuvre qu’un demi pour-cent de toutes ces idées farfelues. C’est pour moi comme un réservoir dont je sais que je ne me servirai que très partiellement ou jamais, mais qui conjure ma peur de ne me souvenir que des choses inintéressantes que m’offre le temps qui passe.
Aujourd’hui, je suis dans le Tarn dans ma vieille maison familiale faite de ce mélange de tuiles, et de quelques briques à travers cette pierre grise claire et friable typique des collines entre Dadou et Ruisseau d’Assou. Après une chaleur écrasante, il fait frais, une fine pluie tombe devant les fenêtres ouvertes sur les verdoyantes collines.
En transit après une semaine très pelliculaire dont les chemins nous ont portés des Rencontres d’Arles [+] à l’Été photographique de Lectoure [+]. Avant de repartir vers de nouveaux gribouillages et captations variées aux sources de la Drôme. Je compulse quelques bouts de ces petits fragments de mémoire en papier.
Un nouvel état sans grande chevauchée aventureuse comme vous pouvez le lire, pas de périple par delà les mers et les continents. Je suis donc juste ici dans cette maison dans l’ombre et la douceur de mes vieilles pierres, à l’abri d’une de ces pluies fines toute en fraîcheur que j’adore sentir dans ces étés en Pays de cocagne.
J’en profite car je sais que ce sera de moins en moins fréquent, nos industries humaines, après avoir favorisé la biodiversité [+] ont fini par inverser la tendance pour nous promettre un avenir bien moins doux [+].
Je lis et relis mes idées, des bouts de dessins griffonnés, couchés à travers des bulles temporaires délavées par ce fameux temps qui passe et les enfouis à nouveau dans le vrac de mon passé.
Il faut que je me rende à l’évidence, je suis très lent pour mettre en route et surtout pour exécuter mes desseins artistiques. Le projet « Aiga – La cartographie sensible de l’eau » traîne à présent depuis dix ans. Je l’ai commencé alors que j’étais sur d’autre projets à long terme comme la poursuite des chemins de la mémoire collective à travers nos mémoires individuelles ou encore ce labeur encore non abouti de mes vidéogrammes du rien et du non-spectaculaire dont vous pouvez voir des extraits sur ce site. Ce dernier projet démarré à la fin des années 90 du 20e siècle, aurait pu aboutir Outre-Rhin il y a un an, c’est à dire au tout début des années 20 du 21e siècle, si la fameuse pandémie n’y avait pas mis un malencontreux coup d’arrêt… Espérons temporaire, afin que je puisse enfin arriver à boucler au moins une boucle avant de passer de vie à trépas !
Bon je vais arrêter de me livrer à ces jérémiades égo-centrées sur ces mémentos de ma vie et revenir à un peu d’actualité de l’art.
Tout de même je ne résiste pas à retranscrire ici une de ces notes griffonnée qui doit dater de la décennie précédente sur laquelle il est écrit : « Tu parles à un mec qui a tourné dans un court métrage habillé en porte jarretelles et dont le personnage qu’il jouait fouettait un couple nu en train de faire l’amour. Alors on ne me la fait pas si facilement ! »
Scénario, dialogue, vécu ? Vous dire pourquoi, comment, quand, et les références serait trop compliqué. Je suis définitivement bien fainéant et bordélique.
Revenons donc à l’art et à ses mystères.
Je vous le disais plus haut dans cette chronique du jour : Thérèse [+] et moi avons voyagé la semaine dernière dans deux manifestations de l’art et surtout de la photo contemporaine évidemment. Deux manifestations qui me paraissent à divers titres incontournables. J’ai écrit « évidemment » certes, mais c’est pour souligner qu’il est évident pour moi que je ne suis pas photographe, enfin « pas trop » photographe.
Tout du moins j’utilise ce médium comme bien d’autres dans ma pratique d’artiste, vous l’aurez compris.
Alors du coup, j’essaye de réfléchir et de discuter avec d’autres sur la place de l’art, de ses pratiques et de sa diffusion.
Samedi à Lectoure, à travers quelques breuvages désinhibiteurs, nous avons eu une longue discussions avec d’autres artistes et travailleurs·ses de l’art sur ce que représente les fondations d’art contemporain pour chacune et chacun d’entre-nous.
J’avais déjà eu cette discussion quelques jours plus tôt, mardi, à Arles avec des photographes et artistes de tous bords. J’emploie ce terme de « bords », car pour tout vous dire et écrire : je me suis aperçu de la complexité du monde de la photographie il y a peu, j’y reviendrai sûrement dans une prochaine chronique.
Quand on parle d’art dans la cité du Felibrige, des felibres et de l’étoile aux sept branches de l’occitan, on parle à présent de la fondation Luma [+]. Alors que penser de tout ce luxe ostentatoire quand l’urgence sociale et l’urgence climatique s’étalent sous nos yeux ? Je vous laisse avec cet article, précisons à charge, sur documentations.art [+].
Du coup la réflexion rebondi sur la fondation Pinault [+] à la Bourse du commerce de Paris, déjà rien que le nom (plus d’écoles d’art, moins d’écoles de commerce, disions nous en manif !) mais pas de mauvais raccourci. Je n’aime pas Marianne et sa ligne éditoriale, c’est un peu comme Le Figaro ou Libé : de la bonne info du bon bloc bourgeois… Mais bon, même s’ils règlent leurs mauvais comptes entre-eux, il y a des articles qui se laissent lire pour s’informer de certaines pratiques sociales dans l’art [+].
Soyons clairs, je ne suis pas à-priori contre ces expériences de monstration de l’art. Il est évident qu’il vaut mieux que l’argent de ces hyper riches passe dans celles-ci que dans des excentricités comme des safaris en Afrique ou l’achat de biens d’hyper luxe ostentatoire. Même si les deux se côtoient parfois. Il y a tout de même cette sensation très bizarre et malsaine de voir sous nos yeux l’incroyable retour à une féodalité qui défie toute loi de la raison.
Comme le disait une amie artiste : « le mécénat c’est le don, les vrais mécènes perdent de l’argent, et c’est ainsi qu’ils méritent une reconnaissance collective ! ».
En fait, tous ces super milliardaires dont il est question dans l’art contemporain (Pinault, Arnault, Hoffmann, …) ne perdent pas un centime dans l’art, ils spéculent défiscalisent des bénéfices qui n’ont pas déjà trouvé refuge dans un paradis fiscal et pour finir pompent l’argent public sensé soutenir les artistes. Ce ne sont pas des mécènes à proprement parler ce sont des femmes et des hommes d’affaires, point !
Il y a quelques années déjà un groupe d’écrivains, des philosophes, des artistes critiquaient le rôle croissant des grands groupes financiers dans l’art contemporain et dénonçaient ces « nobles mécènes » qui ne sont en vérité que des spéculateurs, dans une tribune que l’on peut encore lire : « L’art n’est-il qu’un produit de luxe ? » [+].
Et pour clore ces sujet de l’art contemporain dans ces temps qui passent et ne laisseront que poussières, pourquoi ne pas jeter nos costumes aux orties [+], à l’instar de Marianne Lanavère à présent ancienne directrice de la Criée [+] un centre d’art à Vassivière dans le Limousin.
Il n’est pas réellement tard, mais en cette période estivale et dilettante, je vais tenter de profiter de ma famille dans le cocon de cette vieille maison et vous laisser. Je vous souhaite une belle semaine de fête nationale tricolore et hexagonale. Juste avant de partir je tenais à signaler que l’on dit à Arles en français et en Arles en occitan, juste histoire d’éviter critique et polémique, et pour éviter une autre polémique : oui le provençal c’est de l’occitan… Adisatz a totes e a diluns que ven !

La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…
PhP
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