31.10.2022 – Chronique du lundi
31 octobre 2022 § Poster un commentaire
À l’Est rien de nouveau, il nous reste le Sud… Ou presque !
Après une semaine en dents de scie et dans la confusion matinale d’un changement d’horaire récent autant que biannuel devenu quasiment religieux tellement on se demande à quoi il peut servir, je commence à composer cette nouvelle Chronique du lundi dans l’aimable fraîcheur de ce petit matin du 31 octobre 2022. Je vous y souhaite une bienvenue aussi douce que l’air qui m’entoure.
Pour tout vous avouer, à mon réveil j’ai eu cette bizarre impression d’avoir rédigé le texte de la précédente chronique il y a à peine une paire de jours voire quelques heures tout au plus. Ces contractions du temps deviennent fréquentes en cet automne qui ressemble à un printemps et où je m’octroie l’immense plaisir d’organiser mes journées autour de mes recherches plastiques personnelles. Mon temps n’est plus vraiment le même. Alors qu’au cœur de ce nouveau paradigme spatio-temporel les arbres fruitiers bourgeonnent dans le Midi toulousain. Que je connais des jardins potagers qui, même le nez à l’air libre, donnent encore des kilos de haricots tous les jours. Des jardins où les cucurbitacées n’en finissent pas de fleurir. La nature s’étonne elle-même de ce réchauffement inédit. Et si je me contentais de suivre l’intuition de mon cerveau rationnel, je me dirais que rien de bien positif ne peut naître à l’horizon de ces douceurs. Je pourrais tout aussi bien finir par m’avouer que cette fin du monde est délicieusement belle à l’ombre de ces arbres qui s’épuisent de leurs verdures.
Tout ceci me fait dériver vers cette réflexion autour de nos perceptions d’humaines et d’humains sur la nature de ce que nous nommons… nature !
Et c’est à travers des notes éparses que j’y réfléchis plus encore, des notes qui nous revoient sur un sujet fort intéressant, que vous pouvez retrouver en suivant ce lien [+] sur la chaîne de vidéos du média indépendant en ligne Blast [+] à propos de l’invention à la fin du Moyen-Âge du concept humain de « La Nature ».
Tout cela fait aussi écho à nos recherches plastiques et visuelles à travers le travail que nous menons avec Thérèse [+] Des recherches où nous interrogeons ces frontières si ténues qui séparent le monde dit sauvage du monde de l’anthropocène. Il me tarde que nous puissions montrer rapidement tout cet univers que nous tentons d’explorer souvent à quatre yeux et quatre mains… Avant cette fin du monde dont je vous narrais la beauté vénéneuse plus avant.
Une fin du monde qui n’a pas l’air d’inquiéter les pouvoirs en place de par notre vaste monde, préférant outrageusement culpabiliser celles et ceux qui n’ont déjà pas grand chose, comme nous le dit si bien cet article de Frustration Magazine, ici en lien [+].
Et dans notre belle France c’est plutôt à travers cette pluie de recours à l’alinéa 3 du 49e article de la constitution du pays par notre sémillante première ministre que cette indifférence s’exprime. Je ne vais pas m’attarder aujourd’hui dans ces nauséabonds marigots de la politique hexagonale. Mais je voulais juste revenir sur ce beau cas d’école d’une rumeur et des manœuvres attenantes lancées par les moribonds éléphants du PS. Ainsi que nous le révèle l’Humanité [+] dans un article que vous pourrez lire en lien [+] : « au royaume de la fake news, les Macronistes – et leurs alliés objectifs du Hollandisme – sont rois ! »
Dans une enquête pour tordre le coup à cette belle rumeur médiatique, ce journal a pu vérifier que le mot « immigration » n’avait jamais figuré dans les différentes versions du texte de la fameuse motion de censure posée par la NUPES et que le Front National, pardon le RN, a voté par unique tactique. La rumeur a été lancée par des éléphants socialistes puis reprise par la Macronie. Des débats stratégiques sur le positionnement du texte ont, eux, bien eu lieu.
De l’autre côté on n’oubliera pas qu’une grande majorité des ministres macronistes issu·e·s des rangs de la droite bon chic bon genre ont voté il n’y a pas si longtemps des motions de censure lancées par une extrême-droite qui fait peur uniquement quand ça arrange le pouvoir, ministre des finances [+] et ministre de l’intérieur [+] en tête de peloton. Un Front/Rassemblement National qui reste quoiqu’il arrive l’assurance vie du bloc bourgeois et de sa gouvernance capitaliste, votant avec le pouvoir tout ce qui peut écraser les plus faibles [+].
Enfin il y a tout de même quelques bonnes nouvelles de par le monde, le Brésil a fini par réussir à se débarrasser d’un fou furieux qui fut élu avec sa clique [+] il y a quatre ans à la tête de cet état fédéral et lusophone d’Amérique du Sud. Il fut élu avec l’appui de tout ce qu’il fallait du bloc bourgeois local. Un bloc bourgeois qui comme partout ailleurs gangrène tous les niveaux de la vie publique, de la presse à la police en passant par la justice [+], comme on a pu le voir. L’élection du (presque !) nouveau président [+] de ce pays n’est peut-être pas la panacée d’autant qu’elle est acquise à une très courte majorité, mais cela sonne comme un beau signal d’espoir. L’Amérique du Sud, à travers ses soubresauts et ses tergiversations récentes [+], reste un continent où souffle malgré tout le vent du progrès social et écologique dont le monde aurait bien besoin, quoique l’on puisse en penser. Et c’est chouette, nous autres européen·ne·s ferions bien d’en prendre de la graine !
Du global au local, j’avais juste envie ce matin de dire deux mots aussi sur cette mascarade en cours dans la 4e ville de France. Avec cette opération « des idées pour mon quartier » à Toulouse, où les choix QCM d’une boîte à idées numérique pour chacun des quartiers de la ville sont affligeants de nullité et totalement à côté des enjeux auxquels fait face ma pauvre Ville rose qui s’enfonce encore un peu plus dans un provincialisme caricatural bien catho et paternaliste [+]. Un nouveau cas d’école de communication politique qui allie « greenwashing » et fausse participation citoyenne, mais concoctée par de vrais « pebrons » (prononcer en français : pébrous !), comme on dit dans ce coin occitan de l’Europe. Ça pique bien les yeux et l’intelligence mais on arrête de se lamenter et le combat pied à pied continue pour sortir la capitale de « l’Occitanie centrale » de cet affligeant marasme.
Tenez pour le coup je relaye l’incontournable verve bilingue de l’ami Jacme Gaudas [+], un des derniers grands et salutaires pourfendeurs du provincialisme délétère, à propos de cette recherche de l’art dans les paradigmes occitans d’aujourd’hui, à lire en suivant ce lien [+]. Ça fait du bien et j’en profite pour saluer ici l’amic Jacme fòrça fòrt !
Et puis à ce moment de ma chronique de ce dernier jour d’octobre, je me dis qu’il est vraiment temps d’arrêter de se faire des nœuds au cerveau avec les choses de la vie publique. Je vais vite abréger les souffrances de tout·e un·e chacun·e avec mes approximations du jour, et avant de vous quitter, je vais revenir sur deux ou trois choses de l’art. Même s’il est évident que l’art et la vie de la cité sont intimement liés.
Je ne pouvais passer sous silence le décès de Pierre Soulages [+]. Alors il y a eu évidemment des milliers d’hommages et tout le monde s’est épanché sur des anecdotes de rencontre avec le « maître de l’outrenoir »[+]. Bref une séquence normale suite à la mort d’un grand artiste, même si son âge fort honorable présumait bien de sa disparition prochaine du monde des vivants. Pour ma part, dans un tel cas de figure je préfère présenter mes sincères condoléances à la famille et aux proche du défunt sans m’épancher sur les médias sociaux. En fait la mort de cet artiste, dont l’œuvre restera longtemps encore dans les annales de l’art, m’amène vers d’autres réflexions que l’hommage ou la douleur d’une disparition, malgré toute la sincérité de ces sentiments.
En effet, quand je lis ou j’entends les civilités, les témoignages et autres publications virales qui ressortent à propos de la mort de Pierre Soulages, il y a cette phrase qui ressort souvent, extraite il me semble d’un livre que l’écrivain Christian Bobin avait écrit [+] pour les 100 ans de l’artiste. Une phrase dont les mots disaient en gros que ce Soulages était autant penseur ou poète que peintre. Et moi, je me dis que cette réflexion témoigne à quel point tout le petit monde qui nous entoure ne connaît absolument rien de ce qu’est l’activité et la pratique des artiste visuel·le ou autres artiste plasticien·ne.
Bien évidemment ces pratiques sont constitutives d’une pensée, d’un processus de labeur, d’une poésie et bien plus, qui interrogent le monde. Bien évidemment aussi on peut penser et réfléchir en dehors d’un texte, d’un théâtre ou autre narration sur pellicule. Et je mesure aussi à quel point notre société nage dans un déficit monstrueux dans la connaissance de l’art.
Avant de tourner la page de cette chronique en creux, je voulais vous entretenir succinctement de cette autre chose de l’art qui n’est pas forcément dans le domaine de la création pure mais plutôt dans le terrain vague de l’embrouille et du plagiat. C’est à propos de cette nouvelle affaire où l’artiste contemporain Maurizio Cattelan [+], bien connu pour ses bananes, son scotch et son volume sous forme d’un pape écrasé [+] par une météorite dont la paternité de l’exécution avait été contestée [+] par un artiste bien plus classique, a dépossédé Aurore Le Duc [+] – une autre excellente artiste plasticienne contemporaine – de son labeur comme vous pourrez le lire ici en suivant ce lien [+] vers le blog de Médiapart.
Et surtout, je tiens à le préciser : lisez bien cette tribune pour comprendre comment cette dernière a finement contourné le rouleau compresseur de la vacuité dans l’art contemporain. Une vacuité qui pointe immanquablement son nez quand il s’agit de renouveler son écriture face à un marché avide de nouveauté. À la fin on peut se demander si Cattelan interroge le monde par son art ou n’est juste qu’une agence de publicité. Pour ma part je ne peut que soutenir le processus et le labeur d’Aurore Le Duc dans cette action qu’elle mène face à cela.
On finira par comprendre que, malgré tout le talent du monde, les travers de la gloire et de l’accumulation des richesses amèneront toujours ce genre de comportements de sagouin de la part de personnes souvent hors sol et parfois sans scrupule. Il en est ainsi pour toute société humaine régie par la compétition [+]. Tout comme elles et ils sont des travailleuses autant que des travailleurs comme les autres, les artistes sont des êtres humains au même titre que leurs congénères, leur nature, leurs attitudes et leurs agissements ne dérogent pas aux règles de nos sociétés modernes.
Sur ces belles paroles lénifiantes, je vais vraiment vous quitter, mais juste avant je vous livre une ou deux informations qui me tiennent à cœur pour vous indiquer que, toujours à Toulouse, les forces ne sont pas exsangues au point de baisser les bras et que dans quatre lieux atypiques de cette ville pas si rose, les artistes Julia Gault [+] et Capucine Vever [+] nous donneront à voir dès le 5 novembre 2022 prochain une belle proposition sous le titre très poétique : « En équilibre l’indécise aile du monde » [+]. Une exposition multiple qui mettra en relation leurs œuvres dans ces quatre espaces artistiques offrant chacun une configuration spécifique : un parking souterrain – Le Box [+] -, un appartement – la Galerie du Placard [+] -, un jardin et les abords d’un centre d’art – la Maison Salvan [+] – et un espace de travail artistique – Trois‿a [+] -. Des lieux et espaces dont je vous ai évidemment et souvent parlé depuis des mois dans mes Chroniques du lundi et que je me permets de saluer aussi et ici pour leur persévérance, leur pugnacité ainsi que leur pertinence.
Voilà, après cette chouette information la chronique de ce jour s’achève donc. Je vous laisse encore une fois avec un dessin issu de mes carnet de cette entreprise à long terme qu’est mon « Aiga – La cartographie sensible de l’eau ». Ne vous inquiétez pas il y en aura encore d’autres, puisque je pense avoir dépassé à présent le millier comme si j’avais dépassé un certain kilométrage dans une course de fond. Je vous souhaite une bonne semaine à l’heure d’hiver à présent et vous donne rendez-vous lundi prochain sans faute (ou presque !)…

La suite la semaine prochaine pour une nouvelle « Chronique du lundi »…
PhP
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